Je n'avais que quinze ans
Yves Ardisson lève le voile sur le sédévacantisme
Pour ceux qui voudraient découvrir et tenter de comprendre le milieu très fermé des sédévacantistes, le livre témoignage d’Yves Ardisson est fort intéressant et se lit facilement.
Le sédévacantisme
(de l'expression latine sede vacante signifiant « le siège [étant] vacant »,
utilisée entre la mort ou la renonciation d'un pape et l'élection de son successeur)
est une position religieuse défendue par une minorité de catholiques issue du courant traditionaliste. Ils affirment que le siège du pape est vacant et que les papes récents ainsi que le pape actuel sont des usurpateurs.
Nous y découvrons ébahis comment une famille aimante mais sous emprise d’un prêtre pervers,
laisse son adolescent à quinze ans et demi abandonner ses études et s’engager dans une vie soi-disant monacale. « Je m’étais laissé complètement séduire par le personnage… maman l’admirait beaucoup. Papa s’en méfiait tout de même » Tout est dit !
L’adolescent pieux, pur et idéaliste se retrouve embrigadé ainsi qu’un autre jeune dans la « création d’une confrérie » dirigée par cet abbé Dardières. Celui-ci avait été ordonné prêtre par Mgr Lefebvre et était par la suite devenu un électron libre suivi et soutenu financièrement par un petit nombre de familles.
La promesse de formation qui a été faite à l’adolescent et à ses parents se réduira à étudier seul quelques livres abscons et à subir les humiliations de son supérieur. L’épisode de sa prise de soutane est révélateur : « Je disais à l’abbé que je n’étais pas prêt à porter l’habit…Le rouleau compresseur était en marche et il fallait que je sois broyé à sa volonté…La date fatidique arriva…. Je me savais emprisonné pour toujours… ».
Son amour de la nature, de la musique, sa foi véritable lui permettent de ne pas sombrer complètement. Le service militaire, l’amour de ses parents dont les yeux se décillent petit à petit lui permettront de sortir physiquement de cette communauté au bout de quatre trop longues années.
Mais ensuite échapper psychologiquement à la domination de l’abbé Dardières est un long chemin infiniment douloureux où les rechutes existent. Cette deuxième partie du livre est, elle aussi, fort intéressante et permet de mesurer la puissance et l’étendu d’un phénomène d’emprise.
Nous nous permettrons toutefois quelques petits avertissements aux lecteurs :
- A propos de la préface de Mgr de Kérimel,
il nous semble judicieux de faire remarquer qu’un évêque catholique est toujours heureux d’accueillir dans le giron de son église un échappé de chez les sédévacantistes[i], la tâche de dénoncer l’abus spirituel commis est alors facile. Le dénoncerait-il aussi promptement si la victime venait d’une communauté catholique en vue ?
- L’auteur écrit avoir, entre autres choses, été aidé par des stages d’ennéagramme
lors de sa reconstruction, nous tenons à souligner que nous ne saurions recommander ces stages. A ce propos nous vous invitons à lire l’article d’Anne Lécu (dominicaine et médecin) qu’elle nous a permis de mettre en ligne. (cf. : https://avref.fr/lenneagramme-nest-ni-catho-ni-cashernon-merci.html )
Dans le même registre nous ne recommanderions pas pour se libérer d’une emprise des séances de psychogénéalogie.
- La Fraternité Sacerdotale Saint Pie X que l’auteur et sa famille ont aussi fréquentée n’est pas indemne d’abus en tout genre…
Malgré ces quelques remarques, nous recommandons la lecture de cet ouvrage pour prendre conscience du danger que représentent les sédévacantistes et des difficultés à se reconstruire.
EAN : 9782336409122
ISBN : 2336409127
Éditeur : L'Harmattan
Collection : Religions et spiritualités
Date de publication : 09/11/2023
17/04/2024