Communion et Libération
et sa branche laïque
Memores Domini


Deux nouveaux scandales

Au cours des années 2022 et 2023 la situation semblait tant bien que mal se normaliser, en dépit de fortes discussions internes, sous la présidence par intérim de Davide Prosperi, universitaire milanais.

Mais deux nouveaux scandales ont créé une très forte onde de choc qui dépasse les frontières du mouvement.
Tout d’abord en Italie il s’agit du viol à Rimini au cours d’une retraite spirituelle, d’une jeune fille de 14 ans par un éducateur de Communion et Libération également professeur de religion.

Une personne "de confiance" 

Cet homme de 52 ans, membre des Memores Domini, était également le responsable provincial de Reggio Emilia de la Gioventù Studentesca 'Don Giussani'. Il était considéré comme une personne "de confiance" pour les parents qui lui avaient confié leurs enfants. Arrêté le 19 août 2023 il était maintenu en prison au moment où nous rédigeons cette mise à jour, la juge Silvia Guareschi n’excluant pas « d’autres faits et que d'autres filles aient pu être contactées pour dissimuler d'autres événements". Le retentissement de cette affaire a été considérable dans l’ensemble de la presse italienne.

L’ambiance de suspicion créée par cet événement ne sera pas sans conséquences sur la poursuite ou l’abandon des « écoles de communauté » dont la pédagogie contestable est entretenue par le mouvement pour les adolescents et les étudiants et vise à formater leurs esprits avec un discours et une pensée uniques basés sur la lecture de textes imposés.

L’affaire BACICH

Le second scandale est survenu, cette fois-ci, aux USA. On peut l’appeler l’affaire BACICH, du nom de celui qui a été le leader américain du mouvement, appelé coordinateur national, de 2006 à 2013. Il a également dirigé le programme jeunesse de CL, Gioventu Studentesca, aux États-Unis à la fin des années 1990 et au début des années 2000.
En octobre 2023, dans une lettre rendue publique les dirigeants actuels de CL reconnaissaient que Bacich avait été accusé 

« d’abus sexuels, d’inconduite sexuelle, d’abus psychologiques et de violations des limites perpétrés contre certains jeunes adultes et mineurs de nos communautés », 

avec des incidents présumés survenus entre 1997 et 2018. Le même BACICH qui, dans une interview publiée le 6 septembre 2010 par Catholic Online, déclarait : 

« Venez voir et peut-être voyager avec les membres de CL qui vont dans les communautés, les lieux de travail, les écoles et les organisations, afin d'apporter au monde les joyeuses richesses de la foi chrétienne, qui permet à l'Amour d'entrer dans notre interprétation de la réalité, en éliminant l'obscurité et en faisant émerger la lumière de la Vérité. »

Il est clair que ce type de discours sonne faux tant l’écart est grand entre la parole et les actes. Mais il faut surtout comprendre que, même si ce mouvement cherche à avoir une aura internationale et affirme être présent dans de nombreux pays, il est de fait centralisé en Italie et s’appuie avant tout sur la diaspora italienne présente à l’étranger, y compris aux USA. Les « affaires » auxquelles il est confronté ne pourront donc qu’entretenir un climat de suspicion dont il aura du mal à se débarrasser.




Mais qu’en est-il réellement de ce mouvement 

que ses détracteurs ont surnommé « Communion et Facturation » ou « La lobby di Dio », Le lobby de Dieu ?1

Le mouvement Communion et Libération ( CL ), créé en 1954 par un prêtre italien du diocèse de Milan, Don Giussani, a allègrement enchaîné les scandales de tous ordres depuis ses origines. 

Il participe aujourd'hui à la grande vague de fond qui met sur le devant de la scène les fondamentalismes religieux dans différents pays. Il se présente comme une machinerie puissante destinée à prendre et exercer le pouvoir dans tous les domaines, qu’ils soient culturel, économique, politique ou religieux, surtout en Italie où la nostalgie des États pontificaux n’a pas complètement disparu.

Dans le domaine religieux,

CL est souvent identifié à « une Eglise dans l’Eglise » ( Chiesa nella chiesa ) en raison de son comportement au sein de l’Eglise catholique, au détriment, par exemple, de mouvements installés depuis longtemps dans les diocèses et paroisses. Mais, en se montrant résolument « papiste » sous Benoît XVI et Jean-Paul II, de sorte qu’il apparaissait irréprochable, le mouvement avait su conserver une grande liberté de manœuvre et des protections utiles à la Curie romaine, ce qui le rendait intouchable.

Seul le cardinal Martini s’était opposé frontalement à Giussani quand il était archevêque de Milan. En octobre 1987, durant un synode des évêques, il avait en effet jugé nécessaire de rappeler à un groupe de membres de CL le devoir de « pratiquer les valeurs évangéliques de pauvreté et de justice » et de « résister aux tentations du pouvoir ».

Enfin, CL dispose de sa propre fraternité sacerdotale, St Charles Borromée, qui lui permet d’envoyer de jeunes prêtres formés dans son moule pour mettre en place des « Écoles de communauté » dans différents pays, et ainsi tenter d’y implanter le mouvement.

Enfin, CL dispose de sa propre fraternité sacerdotale, St Charles Borromée, qui lui permet d’envoyer de jeunes prêtres formés dans son moule pour mettre en place des « Écoles de communauté » dans différents pays, et ainsi tenter d’y implanter le mouvement .

Dans le domaine politique,

où, pourtant, l’Eglise avait demandé à don Giussani de réduire son activité, celui-ci est intervenu ouvertement en fournissant, par exemple, des ministres au gouvernement Berlusconi et en créant une faction parlementaire « Rete Italia » à travers Forza Italia. L’affairiste Roberto Formigoni, ancien président de la région Lombardie, condamné et emprisonné suite à des procédures judiciaires, était bien connu pour son engagement dans les « Memores Domini ».

Dans le domaine économique,

outre le contrôle du système de santé en Italie du Nord, l’existence d’une « Compagnie des œuvres » ( Compania Delle Opere ) permet de regrouper une multitude d’entreprises et coopératives souvent agissantes sur les marchés publics dans des conditions qui ont de nombreuses fois attiré l’attention de la Justice italienne.

Dans le domaine culturel,

l’organisation d’une vaste foire de rentrée chaque automne à Rimini, permet au mouvement de compléter les ressources que lui versent les membres de la « Fraternité », ignorants de la façon dont les fonds sont utilisés car aucun bilan consolidé n’est publié.



Bien qu’il soit implanté à travers le monde ( Etats-Unis, Brésil, etc.… ),

ce mouvement garde une spécificité bien italienne avec son parfum de scandales, tant par sa direction totalement centralisée depuis la ville de Milan que par son mode de fonctionnement qui mélange de façon imbriquée, très difficile à démêler, des intérêts de tous ordres… Il entretient également l’autorevolezza, c’est à dire l’autojustification qui lui permet de fixer lui-même ses propres règles de fonctionnement sans véritable contrôle ecclésial.


La dérive majeure que connaît le mouvement est liée à son système de recrutement et de formation

qui repose de façon exclusive sur la pensée et les écrits de Don Giussani à travers les Écoles de Communauté. Ce sont des réunions hebdomadaires de « catéchèse » au cours desquelles toute la formation religieuse repose sur une technique de répétition et de lecture d’écrits le plus souvent indigestes en raison de leur obscurité. Celle-ci apparaît inévitable, voire même voulue, quand on lit la déclaration de Giussani:

« Si la définition des mots les plus importants de la vie est déterminée par la mentalité commune, nous sommes sûrs de tomber dans l’esclavage total, l’aliénation totale ».2
Ce serait donc pour éviter cette « aliénation totale » que les cours sont érigés sur des néologismes ou encore sur des termes connus mais coupés de leur sens commun et redéfinis selon les inspirations du fondateur. Évidemment, l’emploi de ce jargon interne a de quoi rendre perplexes les jeunes recrues, les livrant ainsi aux interprètes et enseignants attitrés, héritiers du maitre des destinées, disparu depuis 2005.

De manière similaire, Thierry de Roucy, fondateur de Points-Cœur, aujourd'hui condamné suite à des scandales, avait bien compris l’intérêt de ces « Écoles de communauté » qu’il avait reprises à son compte pour exercer son emprise sur de jeunes adultes. 

Quant à Don Giussani, vieillissant, probablement grisé par sa réussite, il n’a pas cessé d’asséner ses certitudes et demandait une obéissance à sa personne, déclarant :
« Dieu m’a placé comme responsable pour votre vie  ». 3
Il exigeait de tout membre une adhésion dans sa « totalité », concept qui lui est cher. Nous citons à ce propos un extrait de sa première retraite de la Fraternité tenue à Rimini en mai 1982. Voici ce qu’il disait ( traduit de l’anglais ) :
« La Fraternité est construite notamment comme la norme par et à l’intérieur des groupes d’amis qui viennent ensemble librement…  Ainsi, c’est une solidarité qui n’est pas sentimentale, qui impacte la totalité de la personne, c’est à dire la personne dans sa destinée : il importe d’affirmer la destinée de ces personnes qui sont avec moi ».4
Et il citait une lettre qu’un groupe de professeurs lui avait envoyée, déclarant : « le mouvement implique la totalité de notre personne dans le compagnonnage parmi nous ». Allant plus loin, ces adeptes, pourtant des enseignants, reconnaissaient le mouvement comme « notre seul horizon éducatif ».  Horizon bien délimité !

Plus tard, dans un article publié en 2002 dans le N°1 de son magazine « Traces », Don Giussani demandait à la Diaconie centrale du mouvement une « ultime » obéissance et écrit :
« J’insiste sur le mot ultime obéissance,… ».

Le culte de la personnalité

Aujourd’hui Giussani n’est plus présent, mais, pour se maintenir, le mouvement Communion et Libération est contraint d’entretenir le culte de sa personnalité. Nombreux sont les membres de ce mouvement qui font preuve de bonne volonté en continuant de respecter, sans esprit critique, cette « ultime obéissance ».

Les écrits de Giussani sont cités plus souvent que ceux des pères ou docteurs de l’Eglise qui sont notoirement absents de la littérature interne. Sa pensée, souvent absconse, sert de guide prioritaire aux adeptes, surtout parmi la jeunesse. Son discours ne peut ni être remis en cause ni dépassé car, si c’était le cas, ce vaste château de cartes s’écroulerait et sa chute pourrait menacer certains intérêts. Le successeur de Giussani avait reconnu ce fait quand, le 8 mars 2008, après sa cooptation, il avait déclaré que
« le mouvement est allé de l’avant à cause de son unité, certainement pas à cause de l’autonomie d’opinion de ses membres ».5
Une telle autonomie représentait en effet un risque trop grand pour le pouvoir en place de la « diaconie centrale » aujourd'hui bousculée par le pape François.

Le « business des migrants »

À titre d’exemple des nombreuses »affaires » qui ont éclaboussé CL depuis l’opération « mains propres » des juges italiens, nous vous signalons le scandale de la Cascina, coopérative rattachée à la « Compania delle Opere »( CDO ), révélé au printemps 2015 6. Cette affaire, qui impliquerait Maurizio Lupi, ancien ministre de Berlusconi, un des leaders de la « Compania delle Opere », présente un aspect particulièrement choquant. Il s’agirait d’un système organisé de détournement d’argent destiné aux repas des migrants dans des centres d’accueil de réfugiés et ce, en lien avec la « mafia capitale », autrement dit la branche romaine de la mafia .Le « business des migrants » s’avérant profitable sur une période allant de 2011 à 2014, il s’agirait pour un juge qui s’est exprimé sur ce sujet »  d’une réelle aptitude à commettre un crime. »

En conclusion

Il convient donc de surveiller de près l’évolution de cette « Fraternité », comme toute autre organisation qui exige l’obéissance ultime et la mainmise sur les destinées. L’AVREF recommande la plus grande réserve quant à ses formations, ses rencontres et toute autre forme de recrutement.

La Lobby di Dio, livre disponible en italien, https://www.amazon.fr/dp/8861900933#customerReviews
L. Giussani, Le sens religieux, Cerf, Paris 2003, p. 131.
Adresse aux retraitants de Memores Domini le 12 octobre 2003 - « Oui, c’est vrai, Dieu m’a choisi comme responsable pour votre vocation. C’est une donnée, un fait qui ne peut laisser personne indifférent »…… »L’obéissance à Dieu se donne par l’obéissance à celui qu’il a placé comme « responsable pour votre vie. »Il m’a placé. Il m’a appelé, comme responsable pour votre vie…. »Il s’adresse à vous à travers mes mots, à travers la cordialité de mon cœur. Toute autre solution est très douteuse… ».Extrait traduit de « 30 Days » nov. 2003, version anglaise de l’adresse "Obéissance et paix » publiée dans https://www.30giorni.it.
Extrait de la première retraite de la Fraternité tenue à Rimini en mai 1982.
https://espanol.clonline.org/huellas/pagina-uno/el-entusiasmo-por-la-verdad-se-llama-fe
6 https://asile.ch/chronique/chronique-italie-stefano-liberti-le-grand-business-des-centres-daccueil-en-italie/
Source: article “The Work of the Movement”.

Signalement mis à jour le 23/01/2024


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