Fraternité Notre Dame de Lumière (NDML)
Fraternité Notre Dame de Lumière
La « Fraternité » Notre Dame Mère de la Lumière se présente comme une association de foi catholique organisant des veillées de prières et des pèlerinages. Créée en 2011, l’association basée à Caen veut insuffler l’esprit charismatique dans les vieilles pierres normandes. Les membres fondateurs s’étaient rencontrés à l’aumônerie des étudiants de l’Université en 2008. Sous l’impulsion d’un étudiant en médecine, ils avaient commencé à organiser des veillées de prières et des sessions de guérisons, témoignant constamment de l’influence de l’Esprit-Saint et de leur conversion. Devant leur radicalité et des dysfonctionnements l’accès à l’aumônerie leur avait été finalement interdit.
L’évêque de Bayeux avait refusé d’accorder à Notre Dame Mère de la Lumière une lettre de mission suite une mise sous tutelle de 7 mois, puis à une enquête canonique qui sonne comme un désaveu :
après avoir consulté des canonistes et des théologiens catholiques j’ai décidé de ne pas continuer à donner au groupe une lettre de mission au sein de l’église diocésaine. »
Néanmoins le rapprochement s’est opéré avec d’autres groupes de la même mouvance et même l’évêque d’Angoulême, passant outre la distance géographique et les décisions locales avaient bizarrement accepté de les « accompagner ».
Notre Dame Mère de la Lumière fonctionne sous l’autorité quasi exclusive de son fondateur, un docteur en médecine en froid avec l’Ordre des Médecins qui lui avait reproché lors de son procès – car il y a eu procès en 2018 - un conflit d’intérêt : il serait à la fois médecin au CHU de Caen et guérisseur imposant les mains à ses fidèles et haranguant les foules :
Il a une aura en sa qualité de médecin. Il est médecin partout et tout le temps. Il y a, de la part du Docteur, un abus de l’état d’ignorance. C’est une secte, il s’agit du plus grand intégrisme religieux ! Il y a des actes gravement préjudiciables, cela porte atteinte à l’intérêt collectif.
Durant ce procès, la responsable du « pôle guérison » de NDML a avoué ne pas vérifier les témoignages miraculeux reçus. Ce procès avait été intenté par l’ADFI locale et l’association TOCSIN dont certains membres ont échappé à l’influence du fondateur qu’ils ont qualifiée d’emprise. Il a fait suite à une enquête judiciaire diligentée en 2016 pour « abus de l’ignorance et de la faiblesse » de 16 personnes et L’étudiant devenu médecin fut placé sous contrôle judiciaire en juin 2018.
L’enquête judiciaire avait débuté en avril 2016.
Poursuivi par la justice pour « abus de l’ignorance et de la faiblesse » de 16 personnes, l’étudiant devenu médecin fut placé sous contrôle judiciaire le 26 juin 2018. D’anciens membres de l’association, mais aussi des familles et des proches s’inquiétaient alors de dérives présumées au sein du groupe. Deux plaintes avaient été déposées. Le fonctionnement de l’association serait « sectaire », avait résumé M. Gauthier Poupeau, le substitut du procureur de la république. En ligne de mire, notamment, la mutualisation des revenus au sein du groupe, certains fidèles reversaient en effet la moitié de leurs salaires à l’association afin de financer la location de deux maisons situées dans la périphérie de Caen, et dans lesquelles hommes et femmes vivaient séparément. Pour le Parquet, les membres les plus impliqués étaient bel et bien « sous l’égide du médecin ».
Le procès se tint en 2019.
Mais, parmi les personnes qui adhèrent au mouvement et à son fondateur qui se présente comme son « serviteur », certains refusant de considérer qu’ils sont victimes d’abus de faiblesse, ont contesté l’accusation et, en dépit de la plaidoirie du substitut GAUTHIER POUPEAU qui a signalé que l’association serait « sectaire », le tribunal leur a donné raison en leur permettant de rejoindre leurs deux maisons où des scellés avaient été apposés.
Pour la procureure de la République qui est intervenue, lors de son procès, le prévenu « a renversé les rôles et s’est victimisé. Il s’agit bel et bien d’un esclavage relationnel ». Elle avait requis une peine de 2 ans de prison avec sursis, assortie d’une mise à l’épreuve de 3 ans, 15 000 euros d’amende, l’interdiction d’entrer en contact avec les victimes, une obligation de soins, et l’interdiction d’exercer toute activité associative durant 5 ans.
Le prévenu a été relaxé le 11 juillet 2019, car le délit d’emprise mentale ne serait pas constitué.
Le Parquet avait fait appel de cette décision du Tribunal.
Le procès en appel s’est tenu en juin 2021 et a confirmé la relaxe en septembre.
En deuxième instance, les parties civiles n’étaient plus que trois,
certaines affirmant faire partie du groupe de leur plein gré. Convaincu de la constitution des faits d’abus de faiblesse et de sujétion psychologique, l’avocat général avait pourtant requis douze mois d’emprisonnement avec sursis.
C’est pourquoi, sans aucune remise en question, le leader qui se sent innocenté poursuit actuellement ses activités, notamment l’organisation de pèlerinages dans des lieux controversés comme Medjugorje, l’animation des veillées de prières et de guérison. Il organise également des collectes et maraudes pour des personnes démunies qui lui attirent des sympathies. Il est également admis parmi d’autres communautés charismatiques bien qu’il n’ait pas de mission diocésaine.
Ce que l’AVREF retient de l’aspect judiciaire de cette affaire, c’est la pusillanimité de certains juges à reconnaître l’abus de faiblesse, la difficulté de faire apporter par des témoins des preuves concrètes de ce type d’abus dont, par définition les victimes ne sont pas conscientes.
Le Tribunal aurait pris des risques à requérir des examens psychologiques ou psychiatriques sur ces 16 personnes qui auraient été sous emprise mentale afin de valider la véracité des plaintes. C’est dire que tout concourt à faire de la reconnaissance de ce délit d’abus de faiblesse une épreuve difficile à surmonter pour les plaignants. En effet il est très difficile pour une victime d’abus spirituel d’échapper à l’emprise car, la plupart du temps, l’abuseur répond à une demande initiale d’aide ou à un besoin spirituel. Lorsqu’il y a abus, la victime commence par se remettre elle-même en question car, le pasteur étant un élu de Dieu, le critiquer reviendrait à remettre en cause Dieu lui-même.
Le cas Notre Dame Mère de la Lumière illustre ainsi la prévalence du « judiciairement correct » souvent dépourvu de moyens face au soupçon d’emprise.
Texte mis à jour le 17/04/2023