La Fraternité Eucharistein
Informations récentes dans la presse
> « Le diocèse de Fréjus-Toulon suspendu au sort de Mgr Dominique Rey, »
Sur le site de La Croix, article de Matthieu Lasserre, 6 juin 2023
> « Eucharistein: vœux définitif reportés »,
Sur le site cath.ch, 4 juin 2023 article de Bernard Hallet
> « Abus au sein d’Eucharistein – Graves dysfonctionnements dans une communauté catholique » ,
Sur le site de 24 heures, dossier de Marie Parvex, 22 janvier 2023.
Mis à jour 06/06/2023
Présentation
La communauté Eucharistein fut fondée en 1996 en Suisse, dans un petit village à côté de la ville de St-Maurice. Fondée par le très charismatique Nicolas Buttet, et reconnu en tant qu’association publique de fidèles par Mgr Dominique Rey, elle comporte une quarantaine de membres répartis en trois maison (Epinassey en Suisse, St-Jeoire en Haute-Savoie et Château-Rima dans le Var).
Depuis l’automne 2020 Nicolas Buttet, n’en est plus le supérieur général. Tout en restant membre de la communauté, il se retire pendant une année pour vivre un temps sabbatique. Le nouveau supérieur général est Cyrille Jacquot.
Le comportement de son fondateur n’est pas sans poser de graves questions. Comme l’explique le psychanalyste Michel Begny, des « flux inconscients » peuvent continuer d’agir fort longtemps sur une communauté et sur ses membres même après le départ de son fondateur. Or, justement, cette communauté est souvent perçue comme atteinte de certaines dérives sectaires en raison de la personnalité de celui qui l’a fondée.
Nicolas Buttet
Nicolas Buttet, né en 1961, était un jeune intellectuel se préparant à une carrière d’homme politique et d’avocat en Suisse avant de partir travailler quelques années au Vatican. Il aurait ensuite, selon ses dires, vécu en ermite quelques années dans le canton du Valais. Très vite il est rejoint par quelques jeunes et ensemble ils fondèrent la Fraternité.
Mgr Dominique Rey, prêtre de l’Emmanuel, et évêque du diocèse de Fréjus-Toulon l’a ordonné prêtre en 2003, alors qu’il n’avait pas fait d’études théologiques ni suivi de séminaire. Ses enseignements qui forment la base théologique et spirituelle de la communauté, manquent de profondeur théologique, mais sont devenus pensée unique pour l’ensemble des membres. Les conférences de Buttet sur l’apocalypse et le combat spirituel, lui permettaient à la fois d’inquiéter ses auditeurs et de se situer en maître savant, dominant ces sujets. Ces procédés concourent à renforcer l’omniprésent culte de la personnalité.
Il ne vivait pas comme ses frères et sœurs la vie communautaire, exempté des tâches humbles quotidiennes. Au contraire, on le voyait plutôt dans les médias à côté de gens influents, roulant avec le Saint-Sacrement sur le tableau de bord de sa voiture. Jusqu’à un passé récent, il accompagnait spirituellement la majorité des membres de la communauté tout en étant leur responsable bien que ce mélange de genres soit formellement proscrit par le droit canon.
Les voyages de Nicolas Buttet en été avec des groupes d’étudiants sur les traces du bienheureux Maurice Tornay au Tibet ont été pour lui une manière de cultiver son image personnelle de “trekkeur” et de séduire un public de jeunes pour ensuite les “convertir”.
La Communauté
La communauté est incardinée depuis 2002 dans le diocèse de Toulon. En 2008, Mgr Dominique Rey approuve officiellement ses nouvelles constitutions en vue de la reconnaissance du statut de « famille ecclésiale de vie consacrée ». Cependant, son statut actuel est celui d’« association publique de fidèles. Elle n’est donc pas un institut de vie consacrée, lui permettant de recevoir des vœux définitifs de pauvreté, chasteté et obéissance.
Elle était jusque-là sous la responsabilité du père Abbé de l’abbaye de St-Maurice, Joseph Roduit, étant située sur son territoire abbatial. Le don, par Mgr Rey, d’un château en ruines dans le Var permit à la communauté de s’émanciper de cette tutelle Suisse. Tout cela ne serait heureusement plus possible aujourd’hui depuis la publication du « motu proprio » du pape François « Authenticum charismatis » qui requiert désormais la validation par le Vatican de ce type de décision prise fréquemment auparavant de façon arbitraire par une seule personne.
La Communauté regroupe des hommes et des femmes « consacrés » (vœux de pauvreté, chasteté et obéissance). Ils dépendent du supérieur de chaque maison. La Fraternité déclare vivre du travail quotidien : jardin, élevage d’animaux, travaux de construction, ainsi que de dons. Elle recevrait également des invendus passés de date de supermarchés.
Bon, ce n’est pas dramatique. C’est même écolo-chic maintenant.
La communauté accueille aussi des jeunes “blessés par la vie” selon les propos de la Fraternité, pour “vivre une démarche de reconstruction personnelle”. Dans les faits, les liens et le contact avec les familles sont restreints et découragés, le monde extérieur est décrit comme dangereux, ce qui entraîne des coupures malheureuses, des ruptures inutilement pénibles. De plus, il semble que ces soi-disant « frères et sœurs » ne possèdent pas de compétence spécifique à l’accompagnement de personnes blessées, ce qui engendre du bricolage et amateurisme en la matière. Certaines de ces personnes accueillies comme « blessées par la vie » sont sorties de cette communauté encore plus blessées qu’à leur arrivée.
La communauté pratique assidûment l’adoration eucharistique, de jour comme de nuit, ce qui constitue sa marque de piété propre. En plus de leur travail de reconstruction des personnes accueillies, elle organise des rencontres rassemblant des jeunes ou des familles ou encore leur tiers-ordre. Le résultat de tout cet éparpillement et hyperactivité est un épuisement permanent, disposition idéale pour favoriser la manipulation mentale.
La Fraternité compte 3 maisons :
- Epinassey, Saint-Maurice (Suisse), maison mère effective, territoire abbatial de Saint-Maurice,
- Château Rima (France), diocèse de Fréjus-Toulon, maison mère juridique,
- Château de Beauregard à St-Jeoire (France), diocèse d’Annecy.
Dans son sillage on trouve aussi …
- La communauté Béthanie, le tiers-ordre séculier de la Fraternité.
- Le groupe OAFJ (Only All For Jesus) : des mineurs adolescents et des jeunes signent une charte. Ils s’engagent lors d’une célébration et prononcent des «vœux» après l’invocation de l’Esprit-Saint. Ils participent à environ une soirée par mois et des temps forts spirituels et liturgiques (Festival Metanoia, montée vers Pâques, pèlerinage d’été) organisés par la Fraternité. Les jeunes peuvent séjourner à la Communauté quand ils le souhaitent, et sont encouragés ultérieurement à y vivre une année sabbatique. Il existe un grand danger d’embrigadement auprès de mineurs et de jeunes qui ne connaissent pas encore la vie.
- La fondation Zermatt Summit : réunions de chefs d’entreprise dont le but est de “favoriser la dignité humaine dans notre monde globalisé”
- Les rencontres Dorothée et Nicolas de Flüe : association culturelle qui organise une rencontre annuelle avec témoignages de personnalités diverses.
Mais nous recevons des avertissements
Selon des témoignages concordants et crédibles reçus à l’AVREF :
- Le rythme de vie, sans repos ni vacances, est éprouvant et déstructurant,
- La santé physique et mentale des membres, ainsi éprouvé par la vie communautaire,
n’est pas prise en compte de façon adéquate par les responsables, - La frontière entre for interne et for externe semble ne pas être respectée,
- Le discernement des vocations n’est pas effectué,
- La formation théologique est pauvre et centrée sur la doctrine de Nicolas Buttet,
- La gestion financière paraît obscure.
Le changement de supérieur (Juin 2020) et le départ en année sabbatique de Nicolas Buttet pourrait faire croire que la communauté désire vivre une étape de maturité et prendre ses distances avec le fondateur et ses doctrines.
Une enquête canonique décidée par l’Eglise et menée début 2022 révèle « que l’exercice de l’autorité a été marqué par un système pyramidal abusif, infantilisant et qui a annulé les personnes dans les diverses dimensions de leur être, en particulier leur psychologie. »
A la suite de cet audit,
- Les exorcismes « sauvages » à Château-Rima sont interdits,
- Nicolas Buttet est « assigné à résidence » dans un monastère en France et n’a pas le droit de célébrer la messe en public, de confesser, de prêcher ni de donner des conférences,
- Il est exclaustré pour un an à partir d’octobre 2022,
- Il n’a plus le droit d’entrer en contact avec la communauté.
Modérateur de la Fraternité Eucharistein depuis 2020, Cyrille Jacquot annonce de profondes restructurations de la communauté.
Il est soutenu dans son effort, depuis juin 2022, par le Père dominicain Benoît-Dominique de La Soujeole, et par Mari Carmen Avila, membre de la communauté des consacrées du Regnum Christi (branche féminine des Légionnaires du Christ).
Les « oblats » de la communauté ont été regroupés à Château-Rima dans le but d’en faire des « frères et des sœurs convers ».
Bien que les travaux de restructuration de la communauté ne soient de loin pas terminés, il est prévu que trois de ses membres prononceront des « vœux définitifs » en présence de Mgr Yves le Saux, évêque d’Annecy et prêtre de la communauté de l’Emmanuel, le 10 juin 2023. En de telles circonstances, on peut se poser la question de la valeur de ces vœux. Une fois de plus, les autorités ecclésiales ne semblent pas prendre la mesure des graves dysfonctionnements de la communauté et donc du temps nécessaire pour guérir les blessures et installer une harmonie.
Finalement, dix jours avant, la cérémonie des vœux définitifs a été annulée et renvoyée sine die par Mgr Rey, à cause du contexte ecclésial tendu vis-à-vis des communautés nouvelles, selon ce dernier.
En conclusion, comme cela se vérifie dans bien d’autres communautés nouvelles, se séparer des doctrines d’un fondateur se révèle être une tâche quasiment insurmontable, car cela engage l’identité et donc la pérennité de la communauté. C’est pourquoi, au vu des témoignages fort troublants reçus par l’AVREF, nous recommandons de la vigilance et une extrême prudence face à cette association publique de fidèles.